Jérôme, je te propose de revenir 21 ans en arrière. À quoi ressemblait ActuSF à l’époque ? Il me semble que vous étiez plusieurs fondateurs ? Pourquoi cet intérêt pour les genres de l’imaginaire en particulier ? Qu’est-ce qui vous motivait ?
L’histoire est même encore plus vieille ! Au milieu des années 90, on découvre l’imaginaire au lycée avec une bande de copains (Xavier, Thomas, Pierre…), et on trouve que Tolkien, Moorcock, Dick et d’autres sont beaucoup plus fun que les livres du programme scolaire.
Très vite on s’échange romans, BD et VHS, et on passe des heures à en parler, au point d’avoir envie de créer un fanzine une fois à la Fac. Il s’appellera la 85ème Dimension. Et puis en 2000, la vague internet nous frappe de plein fouet. On lance alors ce qui va devenir actusf.com. Dans le même temps, on publie des livres, des grosses nouvelles disons, à quelques dizaines d’exemplaires, agrafés à la main, et on se met à fréquenter des salons et le fandom.
Il y a 21 ans, ça ressemblait donc surtout à une bande de copains qui bricolaient des trucs depuis leurs chambres chez leurs parents. Il n’y avait pas de plan vraiment précis, pas de programme, pas d’autre objectif que de “faire quelque chose” ensemble. 🙂
La publication d’ouvrages au format papier et numérique faisait-elle partie du projet dès le début ? Est-ce que tu te souviens de la première première publication ?
Pendant qu’on publiait le fanzine, on avait lancé un concours de nouvelles réservé à des gens qui n’avaient jamais publié. Et dans les gagnants, un certain nombre de textes nous avait beaucoup plu, jusqu’à ce qu’on en publie une dans un petit livre fait sur des photocopieuses. Il s’agissait du Déclic de l’horloge de Thierry Legagneur. C’était vraiment très amateur dans la fabrication (mais avec déjà une illustration de couverture dont on était très fier). On avait aussi publié Bronx d’Eric Holstein, et un recueil, Génération 2000, avec les gagnants du concours de cette année là.
Plus tard, quand on a monté la société en 2003, ça nous a semblé naturel de vouloir publier quelques livres en parallèle du site internet. Tout a été très progressif.
En 2013, Actu SF s’est associée à Mnémos et aux Moutons électriques pour fonder les Indés de l’imaginaire. Pourquoi ce projet ? Avec huit ans de recul, quel regard portes-tu dessus ?
C’est une super expérience ! L’idée de base, c’était de se regrouper pour mener plusieurs projets ensemble, du partage de stands sur des salons à la création d’un petit magazine gratuit, l’Indé, disponible deux fois par an, en passant par le partage des collections Hélios et Naos. C’est faire le choix du collectif pour grandir. C’est top !
La ligne éditoriale d’Actu SF a-t-elle évoluée avec le temps ? Dans le catalogue, je vois de beaux romans, des romans jeunesses, des romans graphiques… était-ce prévu depuis le début ? Parle-nous de ta publication la plus folle !
Au départ, rien n’était vraiment prévu. On ne voyait pas beaucoup plus loin que le livre à venir. Puis, peu à peu, un catalogue a pris forme, les envies se sont multipliées, et on s’est lancé dans de nouvelles aventures. Il y a aussi eu des rencontres et des opportunités.
Par exemple, pour la jeunesse (les 8-12 ans), tout a commencé par une discussion avec Danielle Martinigol qui avait envie de faire des livres avec le château de Guédelon qu’elle connait bien. On lui a emboîté le pas et on a lancé notre première série jeunesse, Aventures à Guédelon.
Quand à la publication la plus folle, c’est sans doute la biographie de Lovecraft, Je suis providence, de S.T. Joshi. Il y avait 4 millions de signes à traduire en un an. Un sacré challenge réussit par Christophe Thill et son équipe de traducteur et de traductrice…
Je suis sensible à la diversité des romans, des personnages, des auteurs et des autrices qui remplissent le catalogue d’Actu SF. Plus de représentativité, est-ce une volonté de ta part ou une évolution naturelle ?
C’est gentil. C’est sans doute la conjonction de pas mal de choses. Evidemment, on est attentif et on est sensible à tout ce qui se passe et aux manques criants dans le monde de l’édition. On trouve aussi sans doute désormais dans les manuscrits plus d’histoires avec plus de diversités. Et j’en suis heureux. C’est important. On y fait attention.
Parlons un peu de l’avenir, quels les sont les projets d’Actu SF ? Penses-tu créer de nouvelles collections ? Quel genre de titres cherches-tu ?
On planche sur la fin d’année et on a un joli programme, avec notamment une anthologie de science fiction française dirigée par Sébastien Guillot (Par Delà l’horizon) qui sortira en octobre. On aura aussi une version collector absolument génial du Club des punks contre l’apocalypse zombie de Karim Berrouka, et des nouveautés avec Morgan Of Glencoe, Danielle Martinigol, Thomas C.Durand, Isabelle Bauthian… La rentrée s’annonce fort sympathique !
Et puis en parallèle, on travaille sur la Convention Nationale de Science fiction qui aura lieu cet été à Nice (Inscrivez vous, ça va être génial), une étude de lectorat avec l’Observatoire de l’imaginaire et la nouvelle édition du Mois de l’imaginaire !
Pour les nouvelles collections, il y a quelques idées qui trainent…
Et pour les titres, c’est toujours une grande question que de savoir ce qu’on cherche. A titre perso, j’aime les romans nerveux et courts. Mais d’abord on est une équipe avec des goûts différents. Et parfois l’idée d’un cycle peut aussi nous séduire… Bref, je botte en touche ! Ce que je cherche, ce sont les romans de qualité !