Corriger son roman : se préparer

Nous sommes en décembre, tu as terminé le nano (ou pas) et te voici avec un premier jet à corriger. L’intrigue part dans tous les sens, les personnages n’en font qu’à leur tête, le style est terrible, des gouttes de sueur froide perlent sur ton front fiévreux.

Repose-toi d’abord. Si, j’insiste ! Lis un bouquin, regarde une série, fais du sport, cuisine des cookies, prend un bain, tricote, plie des orgamis… Ce n’est PAS du temps perdu. Tu as besoin de prendre du recul pour y voir clair.

Te voilà de retour ? Tu me dis que les vrais auteurs écrivent tous les jours, que les pro travaillent au moins 40h par semaine etc. Très bien, parlons d’efficacité.

Les phases de travail

1 – La méthode linéaire : 

La méthode linéaire, la plus naturelle, c’est :

  • d’écrire le premier jet du roman A, 
  • le relire seul et le corriger, 
  • le faire lire par des béta-lecteurs, 
  • le corriger encore un certain nombre de fois avant de l’éditer (soit l’auto-publier, soit le proposer aux éditeurs… à chacun son objectif, ce n’est pas le sujet de cet article).
Cette méthode linéaire n’est pas la plus efficace pour plusieurs raisons :
  • il faut du recul entre chaque étape et tu « perds » le temps nécessaire pour récupérer un œil neuf,
  • tu ne travailles qu’un seul aspect de l’écriture à la fois (longue période de premier jet, puis une série de phases de corrections qui s’enchaînent) ce qui est souvent lassant et décourageant,
  • la charge émotionnelle du roman A ne fait que croître et il risque de te sortir par les yeux,
  • à la fin tu n’as travaillé que sur un projet et comme le dit le fameux proverbe, il ne faut pas mettre tous ses œufs dans le même panier.

2 – La méthode alternée : 

Je te présente donc une méthode qui alterne les différentes phrases de travail  :
  • écrire le premier jet du roman A,
  • commencer le premier jet de roman B et le finir ou pas,
  • relire roman A par soi-même et le corriger (phase 1),
  • l’envoyer aux bétas-lecteurs,
  • finir roman B pendant ce temps, ou commencer roman C,
  • une phase de correction sur roman A (phase 2), suite aux retours des premiers Béta-lecteurs,
  • relire roman B par soi-même et l’envoyer aux bétas lecteurs,
  • commencer ou poursuivre roman C,
  • faire une phase de correction sur roman A (phase 3).
Je m’arrête là, tu as compris le truc. Cette méthode permet :
  • d’avancer sur un texte tout en prenant du recul sur un autre,
  • de varier les phases d’écriture sur lesquelles tu travailles (premier jet, corrections de fond, corrections de forme…) ce qui les rend moins lassantes,
  •  de répartir la charge émotionnelle sur plusieurs projets et de travailler sur celui que tu sens le mieux,
  • d’avoir plusieurs cordes à ton arc si un projet ne fonctionne pas comme prévu (cf les romans maudits).

Se relire soi-même

Le réflexe, c’est de se relire au fil de l’eau, en prenant des notes (sors tes fluos, tes commentaires dans la marge etc).
 J’ai remarqué pour ma part que cette relecture n’est pas très efficace :
  • si je manque de recul,
  • si je ne cherche pas consciemment les améliorations possibles sur le fond.

Lors d’une lecture au fil de l’eau, je me laisse souvent emporter par l’histoire. Du coup, je vais noter dans la marge quelques détails comme une phrase mal rédigée, un dialogue qui fonctionne mal… et tout ce qui concerne le fond, la structure, le rythme me file entre les doigts.

Il faut donc se poser des questions : 
  • sur la gestion des informations : je connais mon univers, mais pas les lecteurs. Je dois prendre garde à distiller l’information progressivement. Assez pour qu’ils comprennent bien les enjeux de l’histoire, mais pas trop car cela devient indigeste (c’est le risque d’info dump).
  • sur la structure : comment s’entremêlent les points de vue ? La chronologie tient-elle debout ? Les grandes étapes sont-elles bien réparties par rapport au volume du roman ? Il est parfois utile de faire une frise, une carte mentale, ou toute autre représentation qui permette de visualiser l’enchaînement des événements et leur place dans le roman (cf structurer son roman).
  • au rythme et au suspens : je ne m’ennuie pas en lisant mes romans, je les aime sans condition, mais les lecteurs ont besoin d’être tirés en avant. Je ne dis pas qu’il faut enchaîner les cliffhanger, car toute méthode répétitive devient ennuyeuse. Par contre, en me relisant, j’essaie de penser à ce qui pourrait donner encore plus envie de lire la suite.

Faire appel aux béta-lecteurs

Photo de fauxels provenant de Pexels
Cela dit, il arrive un moment où j’ai trop le nez dans le guidon. Je ne vois plus rien par moi-même et j’ai besoin d’un regard extérieur. C’est le moment de faire appel aux béta-lecteurs, ces personnes qui vont se pencher sur ton manuscrit et revenir vers toi avec un retour détaillé.
  • Combien ? Je pense qu’il en faut au moins deux pour pouvoir comparer les avis, avec leurs points communs et leurs divergences. Mais il n’en faut pas trop sous peine de se noyer parmi des remarques nombreuses et parfois contradictoires. Je ne dépasse pas les cinq pour ma part.
  • Qui ? Ton roman ne plaira jamais à tout le monde, donc choisis des personnes de confiance, qui aiment le genre de roman que tu écris. Ton béta-lecteur doit saisir ce que tu essaies de faire. Les goûts et la sensibilité comptent.  Ce n’est pas la peine de me faire béta-lire de l’horreur, tu comprends ?
  • Où ? Ce n’est pas facile, de rencontrer les bons béta-lecteurs. Je te recommande de fréquenter les forums, les réseaux sociaux, les salons, où naviguent ceux qui aiment les mêmes livres que toi. 

Hum, cet article dure déjà une plombe alors que je n’ai même pas parlé des corrections à proprement parler. Je vais donc te laisser sur un cliffhanger insoutenable et te donner rendez-vous dans le prochain article pour parler de plan de correction et de corrections par axes !

2 réflexions sur “Corriger son roman : se préparer”

  1. Un article très intéressant, ma chère Célia, c’est toujours un plaisir de lire tes réflexions sur l’écriture : je me rends compte que je partage beaucoup de ton processus en alternant les phases de correction, de premier jet et de réflexion sur différents projets : la dynamique qui s’en dégage est (pour moi) beaucoup plus efficace que si je m’englue dans des corrections à n’en plus finir (mais j’aime bien les corrections, si , si). Et en ce moment je teste sur une même journée une phase de premier jet, pause, puis une phase de correction sur un autre projet (et même parfois une phase de relecture sur un troisième, mais là ça devient acrobatique^^) : c’est tout à fait efficace. Et avec les années, je constate de plus en plus l’importance des temps de mise en jachère du texte entre les différentes étapes où je ne pose plus les yeux dessus pendant plusieurs semaines ou plusieurs mois afin d’y revenir plus tard avec davantage de recul. J’ai hâte de lire la partie deux de ton article !

    1. Je suis heureuse que cet article t’intéresse et corresponde à ton expérience. Le temps, rien ne peut le remplacer, et nous voici transformés en jongleurs entre les projets.

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